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Avis dans le cadre de l'enquête publique sur le projet de parking sous la place Cockerill

mardi 30 juin 2015, par Mathilde Collin

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Monsieur le bourgmestre,
Mesdames et Messieurs les échevins,

J’ai l’honneur, par la présente, de vous adresser les observations de l’asbl urbAgora dans le cadre de l’enquête publique, actuellement en cours, sur le projet de parking sous la place Cockerill (dossier 82863-C).

1. Tout d’abord, notre association s’oppose, sur le principe, à la construction de ce parking dont la nécessité ou même l’utilité nous semble fort loin d’être démontrée — mais dont les conséquences sur la ville et ses habitants seraient de première importance. La plupart des parkings du centre-ville ne sont en effet remplis que quelques jours par an (principalement les samedis avant les fêtes ou les jours de gros événements). Pour ces journées de forte affluence, de multiples solutions existent, notamment :

  • Ouvrir ponctuellement au public des parkings existants (relevant du secteur public ou du secteur privé) dans le centre-ville mais inaccessibles à l’heure actuelle (Ethias, Liège 1, etc). Des applications mobiles existent d’ailleurs pour permettre ce type de mise à disposition de façon relativement aisée, ce qui bénéficierait d’ailleurs aux propriétaires de ces parkings. Ce type de mesures (le modèle « Saint-Servais ») pourrait permettre de répondre aux pics de demande d’une façon beaucoup moins coûteuse que par le projet ici envisagé.
  • Mettre en œuvre une information en temps réel sur la disponibilité des parkings — ainsi que cela existe dans presque toutes les grandes villes de notre continent —, qui permettrait d’optimiser l’usage de ceux-ci et notamment de limiter le phénomène des voitures tournant dans le centre à la recherche d’une place libre.
  • Intensifier fortement la promotion des modes actifs, dont la part modale reste mineure à Liège. De multiples mesures supplémentaires pourraient être prises en ce ce sens, mais la première et la plus évidente consiste déjà à ne pas dégrader les infrastructures cyclables là où elles existent (ce qu’il est pourtant question de faire dans le présent dossier). Nous relevons d’ailleurs l’absence générale de prise en compte des enjeux de mobilité cycliste dans le projet qui est soumis à enquête publique.
  • Et surtout développer le réseau de transport public, qui est très loin, à Liège, d’être suffisant pour une agglomération de plus d’un demi-million d’habitants. Le tram — en ce compris la ligne transurbaine — et le REL seront déterminants à cet égard. Accompagnés de parking « de délestage », ils pourraient soulager significativement la pression automobile dans le centre-ville (notamment pour les usagers « pendulaires », qui restent toute la journée dans le centre-ville, et pour qui l’arrivée en voiture jusqu’à leur point de destination semble un luxe fort coûteux pour la collectivité).

Il nous semble qu’il vous sera fort difficile de défendre une politique d’augmentation de l’offre de stationnement dans l’hypercentre liégeois tant que des mesures alternatives de ce type n’auront pas été menées à bien d’une façon beaucoup plus importantes que les timides avancées que l’on peut mettre à votre crédit depuis quelques années.

2. Ensuite, nous nous opposons sur la manière dont ce dossier a été mené.

  • Nous regrettons que la Ville ait mis fin à la mission du bureau AIUD, qui avait pourtant dégagé des pistes intéressantes (même si non publiées, comme c’est le cas le plus souvent pour les études financées par la Ville).
  • Nous regrettons le manque de concertation dans le dossier et la brièveté de l’enquête publique. Un dossier d’une telle ampleur demande, pour être mené à bien, un esprit de dialogue bien différent de celui qui s’est exprimé jusqu’à présent.
  • Nous regrettons l’attitude servile adoptée par la Ville à l’égard des exigences du secteur privé. Nous nous interrogeons fortement sur les intérêts qui sont poursuivis par le Collège dans ce dossier : s’agit-il réellement de ceux des Liégeoises et des Liégeois ? Si tel est bien le cas, pourquoi, notamment, ne pas avoir tout simplement laissé au promoteur du complexe Grand-Poste, le soin de construire lui-même un parking sous sa parcelle située le long de la rue de Florimont (quitte à l’autoriser à déborder sous l’espace public), ce qui semble tout à fait possible et certainement pas plus compliqué sur le plan technique que sous la place Cockerill ?
  • Nous déplorons qu’un aménagement aussi important n’ait fait d’objet d’aucun concours d’architecture. S’il devait être démontré qu’un parking à cet endroit est effectivement nécessaire (et que les alternatives avancées ne sont pas concrétisables), il ne fait pas de doute que sa réalisation pourrait se faire d’une manière infiniment moins dommageable à l’espace public et aux autres usages des lieux, éventuellement en optant pour un accès entièrement souterrain qui permettrait de dégager complètement l’espace public et de créer, sur le Quai-sur-Meuse, une esplanade piétonne rendant enfin au centre-ville un débouché direct sur notre fleuve, sur le modèle de Maastricht. Ceci suppose cependant d’envisage le dossier sous un angle tout différent, en donnant la priorité à la qualité de l’espace public (et en missionnant pour cela, après une compétition ouverte, une équipe pluridisciplinaire) et non en centrant l’entièreté du processus sur le seul parking.

3. Enfin, nous relevons la singulière médiocrité des aménagements proposés pour la place Cockerill. Nous pointons en particulier :

  • Le choix de doubler les accès à ce parking, qui a amené à placer une rampe d’accès aussi intempestive que dispensable au milieu de la place. Ce choix n’est semble-t-il dicté que par un seul motif : la nécessité d’étendre provisoirement la Batte vers l’amont, le temps des travaux du tram — c’est-à-dire la conséquence du choix extrêmement litigieux de faire passer le tram par les quais alors qu’il était possible de le faire passer en double sens par Feronstrée (ce qui aurait notamment permis une prolongation du tram vers la place Vivegnis et vers le futur téléphérique ou vers Outremeuse via le Pont Maghin, options qui sont purement et simplement rendues impossibles par le tracé retenu). Autrement dit, le sacrifice de la place Cockerill apparaît comme une conséquence nuisible supplémentaire des mauvais choix posés dans le dossier du tram. Une fois de plus, nous vous appelons donc à opter pour un passage du tram en double voie par Feronstrée.
  • L’absence d’espaces publics utiles à l’université sur la place Cockerill, alors que l’opportunité en semble évidente.
  • La dégradation de l’itinéraire suivi par les bus (abandon du site propre, double chicane, etc), qui portera préjudice à de nombreux usagers des transports publics (et là encore, les choses vont dans le mauvais sens).
  • Le caractère particulièrement étriqué des aménagements proposés : les accès piétons du parking semblent avoir été disposés de manière à rendre impossible tout usage festif ou événementiel de cet espace ; quant aux « espaces verts », ils apparaissent comme des espaces tampons, dépourvus de toute aménité et destinés à cacher tant que faire se peut l’omniprésence de la voiture dans l’aménagement proposé.
  • L’absence d’un espace de stationnement pour vélos. La proximité de l’université, d’itinéraires cyclables structurants, du théâtre, du coeur commerçant plaide pourtant pour un vaste espace de stationnement sécurisé pour les vélos (potentiellement plusieurs centaines de places, le cas échéant en sous-sol, comme à la gare d’Anvers, ou dans le complexe de la Grand-Poste).
  • L’absence d’une réflexion sur les usages de la voiture, qui sont bien plus variés que ce que propose un gros parking en sous-sol (livraisons, kiss & ride, courses rapides, voitures partagées,…). On se demande aussi où sera localisé le stationnement pour les riverains du quartier.

Pour ces différentes raisons, nous vous demandons de rejeter la demande de permis actuellement pendante.

Nous suggérons aussi que la refonte annoncée du Plan communal de mobilité (PCM) soit l’occasion d’une réflexion d’ensemble sur le devenir de la mobilité à Liège, à moyen et à long terme. Il serait plus que souhaitable d’associer les citoyens liégeois à cette réflexion, à travers la mise en place d’un comité d’accompagnement ouvert au secteur associatif ou à travers l’organisation de tables rondes thématiques et par quartier, ouvertes à tous les citoyens. Si cela vous paraît utile, nous serions très heureux de formuler des propositions concrètes en ce sens.

Je vous prie de recevoir, Monsieur le bourgmestre, Mesdames et Messieurs les échevins, mes salutations très distinguées.

Mathilde Collin
présidente d’urbAgora

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