Des casernes ou commissariats obsolètes, des églises désacralisées, des bureaux vides, mais aussi des garages inutilisés. Paris manque de logements? «Qu’à cela ne tienne! Transformons nos garages existants plutôt que de les démolir! Il est faux de croire qu’on baissera les prix immobiliers en construisant plus», affirme Alexandre Labasse, architecte et directeur général du Pavillon de l’Arsenal. Une gentille pique à l’actuel gouvernement dont le projet de loi logement a pour mot d’ordre: «Construire plus et moins cher».

» LIRE AUSSI - Viens chez moi, j’habite dans une usine!

Quoi qu’il en soit, les faits sont là: près de 65% des ménages parisiens n’ont pas ou plus de voiture, selon l’Insee. La question de l’utilité des garages-parkings et leur obsolescence à terme se pose avec de plus en plus d’acuité. «À ce jour, aucun recensement exhaustif du nombre de garages capables d’être transformés n’avait été réalisé», déplore Alexandre Labasse.

Une agence d’architecture s’est attelée à cette tâche et en a identifié environ 500. Puis ce repérage a été réduit aux locaux dont les caractéristiques intrinsèques, dimensionnelles et/ou techniques laissent envisager un éventuel potentiel de transformation. Data Architectes en a ainsi sélectionné 135. «Il s’agit d’un réseau dense et assez bien réparti sur l’ensemble des vingt arrondissements de Paris», explique Colin Reynier, cofondateur de l’agence qui dévoile au Pavillon de l’Arsenal (IVe arrondissement de Paris) son exposition intitulée «Immeubles pour automobiles» (jusqu’au 2 septembre).

» LIRE AUSSI - En plein cœur de Paris, un ancien garage transformé en HLM

Au total, ces garages représentent une surface de plus de 600.000 m² et un volume de près de 2,4 millions de m3, soit 1 m3 par Parisien. «Les bâtiments étudiés regroupent également 150.000 m² de toitures actuellement sous-exploitées et immédiatement utilisables pour créer des espaces végétalisés», ajoute Raphaël Menard, président d’Elioth Ingénieurs. Si les 135 garages étaient transformés plutôt que démoli, ce serait l’équivalent de 120.000 tonnes de CO2 qui ne rejoindrait pas l’atmosphère. «Transformer plutôt que démolir permet de réaliser une économie de 40% d’émissions de CO2», affirme Raphaël Ménard.

La façade du garage Ponthieu Automobiles vers 1907 Crédit Photo : Charles Lansiaux/© Charles Lansiaux / DHAAP / Ro

» LIRE AUSSI - À Lyon, la magistrale transformation d’un garage Art déco

Une fois vidés de leurs automobiles, ces immeubles peuvent adopter différents usages: des logements mais aussi des plateformes logistiques ou encore des lieux de stockage de matériau de construction et de déconstruction. Un quart des 135 garages parisiens doivent accueillir des logements sociaux. C’est notamment le cas d’un ancien garage et son parking aérien situé en plein cœur de Paris (voir notre photo ci-dessous). «Transformer un garage en logement est le programme le plus complexe d’un point de vue technique, usages et normes. C’est pourquoi la plupart des propriétaires adoptent la même stratégie: ils démolissent le garage. C’est dommage.»

L’ex-siège de Libération rue Béranger (IIIe arrondissement de Paris) était un ancien garage. Crédit Photo : Capture d'écran via Google Maps
Un ancien garage automobile a laissé place à cet immeuble de 34 logements situé au 151 rue du Faubourg Poissonnière (IXe arrondissement). Crédit Photo : Capture d'écran via Google Maps
Construit à la fin des années 20, le garage La Motte-Piquet (ici l’entrée de l’établissement sur la rue de la Cavalerie dans le XVe arrondissement de Paris) existe toujours. Il est le seul classé monument historique. Crédit Photo : Capture d'écran via Google Maps