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De Liège à LiègeTogether : Qui formate l'image d'une ville ?

Retours sur un débat multiple

Durant la semaine de Toussaint, l’ASBL Barricades, en collaboration avec Convivance Théâtre, a organisé un atelier de création cinématographique s’adressant à toutes et tous autour du thème de la diversité des regards sur la ville. Ce stage « Filme ta ville ! », en cinq journées, a pu faire émerger des courts-métrages d’une grande qualité, non seulement en termes graphiques mais aussi dans leurs capacités à afficher une multiplicité de façon de voir et de concevoir la ville de Liège, et en particuliers le quartier de Pierreuse. Pour clôturer cette semaine intense, le week end fut l’occasion de visionner ces créations, mais également de réfléchir, ensemble, autour de la question de l’identité de la ville de Liège et de la façon dont celle-ci est aujourd’hui utilisée par les pouvoirs publics. Une note donc, pour revenir sur les réflexions qu’a suscitées ce débat animé par urbAgora.

Cinq films, cinq regards précis, poétiques, parfois politiques, en tous cas toujours personnels qui offrent à voir Liège par les yeux de Valentine, Christine, Jean-Michel, Steve et Saïd. Sont ainsi traités tour à tour une relation biographique à Liège, et au retour en ville ; les joies de la vie de quartier, et les frustrations face aux refus de certains d’y participer ; Les contrastes frappants mais aussi les surréalistes rencontres entre ville et nature ; Les injonctions paradoxales de la vie urbaine et leur absurdité parfois corrosive ; enfin la légitimité toujours plus restreinte de certaines populations à occuper l’espace urbain et le traitement visiblement différencié des populations les plus dotées et de celles qui n’ont même plus un toit au-dessus de leur tête.

Autour de ces cinq courts récits audio-visuels, une question : l’image de la ville, son identité et qui est en est garant. En effet, la question se pose : depuis 2013, la marque « Liege Together », avec à sa tête la Ville et la Province de Liège, se prévaut de diffuser une image métropolitaine, dynamique et attractive de la ville dans toute l’Europe, à l’instar d’autres actions similaires de « marketing territorial » tels « I AMsterdam » ou « I Love Lyon ». Mais quelle légitimité ces organismes, même publics, ont-ils à créer une identit éurbaine ? Pour qui est donc destinée cette création ? Et comment celle-ci correspond-elle avec cette multiplicité de regards coexistant que révèle l’atelier « Filme ta ville ! » ?

Ce sont là des questions délicates et complexes, qui n’ont pas manqué d’animer la soirée. Il est bien sûr essentiel de faire prospérer financièrement une ville pour la développer, donc d’attirer des investisseurs potentiels. Or, la publicité la plus efficace est toujours simple, directe, résumable en une phrase, un logo. Mais la ville est avant tout un lieu de complexité, de diversité, de croisées de chemins et de regards. Si Liège, comme l’ont affirmé certains intervenants, a une « âme », c’est peut-être d’abord parce qu’elle contient un nombre infini d’identités différentes. Celles-ci reflètent des chemins de vie, des expériences et des sensibilités toutes personnelles qui enrichissent et multiplient jour après jour ce qu’est Liège pour chacun.

Il n’est alors pas si étonnant de voir des tensions fondamentales émerger entre la « marque » Liege Together et les ressentis des habitants : là où chacun participe de sa propre vision de la ville au jour le jour, une image impérieuse, formatée et lourde en objectifs de rentabilité y est apposée, sinon opposée. Le débat se fait donc vif sur la légitimité d’une telle image et de sa production, et sur le sentiment que de tels procédés peuvent provoquer chez les habitants.

Il est par ailleurs important de souligner que les propos ne se limitent pas à dénoncer une sorte de sentiment diffus de frustration. Une vive opposition se dresse aussi face au rejet très concret de la légitimité de certaines catégories de la population à occuper l’espace urbain. La récente démolition de l’accès à la passerelle des Chiroux, jugée inutilisée et insalubre par les pouvoirs publics fait là figure d’exemple. Si il s’agit là de l’amorce d’une rénovation de la place des Carmes, elle annonce bien que celle-ci ne se fera ni accueillante ni bienveillante pour les personnes sans logis qui utilisaient précisément le calme et le peu de passage de la passerelle pour y résider en toute discrétion. Les transformations de Liège, telles qu’annoncées par la marque Liege Together apparaissent donc pour beaucoup comme faisant partie prenante d’une vision de la ville dédiée aux plus riches, pour donner toujoursmoins de place aux plus démunis. Peut-on vraiment leur donner tort quand, chiffres à l’appui, il apparait évident que le nombre de logements sociaux à Liège n’a fait que décroître dans les dernières années, sans qu’aucun projet récent de nouvelles créations ne voit le jour, avec ou sans le label Liege Together ?

Quoi qu’il en soit, il apparait évident que le débat sur l’identité de Liège, et son utlisation à des fins promotionnelles, n’a ici été qu’amorcé. L’adhésion à l’image véhiculée par Liege Together ne va en tous cas pas de soi. Si cinq jours ont suffi à ces apprentis réalisateurs à produire ces regards liégeois, peut-être que la marque métropolitaine, avec les moyens dont elle dispose, pourrait faire émerger une image bien plus plurielle, issue des croisements entre autant de regards qu’il y a de liégeois. Cela, pour autant, attirerait-il le chaland ?

 

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