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Communiqué

La démolition du théâtre de la place de l’Yser, on (re)commence par la fin

lundi 16 décembre 2013,

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La Ville de Liège semble décidée à agir vite dans le dossier de feu le Théâtre de la place : le Conseil communal de ce 16 décembre 2013 doit voter sur la démolition du bâtiment de la place de l’Yser.

Nous nous interrogeons sur les raisons qui justifient de prendre une décision à ce propos dès à présent, compte tenu de l’absence, à notre connaissance, de réel projet pour l’aménagement de la place. Rappelons en effet que, dans le Master plan commandé par la Ville pour la requalification de l’espace public de la place de l’Yser et alentours, la démolition du théâtre est considérée comme une donnée du problème, un préalable au travail d’étude. Le seul degré de liberté laissé au bureau d’étude a consisté à lui permettre d’envisager ou non la conservation du parking souterrain situé sous l’actuel bâtiment du théâtre. La possibilité de conserver le bâtiment n’a jamais été étudiée.

Dans ces conditions, le risque de perdre (ou de devoir reporter) un subside régional à la démolition ne nous semble pas un argument suffisant pour précipiter une décision dans ce dossier.

Car, même si ce bâtiment a été conçu comme un hébergement provisoire pour l’ancien Théâtre du Gymnase, expulsé de son site historique par les démolitions de la Place Saint-Lambert, il n’en demeure pas moins toujours debout. Et si les techniques, l’isolation ou les châssis sont de toute évidence dépassées, les structures portantes sont quant à elles intactes : les dalles de béton et autres colonnes métalliques n’ont pas perdu leurs propriétés mécaniques de portance.

Une rénovation lourde est donc techniquement envisageable ; la question de son coût et du bénéfice de cette solution semble avoir été, par principe, exclue dès le départ du débat. On peut lister les principaux problèmes que connait aujourd’hui le bâtiment : plusieurs défectuosités de l’étanchéité de couverture, un manque d’étanchéité des façades réalisées en éléments de béton autoclavé léger, une isolation insuffisante, comme pour tous les bâtiments de cette époque. Les solutions techniques existent. Il est tout à fait envisageable de procéder à un renouvellement de l’étanchéité, associé à une nouvelle isolation renforcée, qui peuvent résoudre le problème de la toiture. Les parois du bâtiment et de la cage de scène pourraient quant à elles être sur-isolées par l’extérieur et revêtues d’un nouveau parement. En ce qui concerne les techniques, un rééquipement complet serait sans nul doute nécessaire, mais le tout est de voir quel niveau de confort on souhaite et à quels usages on destine le bâtiment.

À une époque où la réduction de l’empreinte énergétique grise est plus que jamais un enjeu écologique et économique (le coût de construction d’infrastructures neuves a cru de façon substantielle au cours des dernières années et va vraisemblablement continuer à croître), dans un contexte aussi où la dépense publique doit être optimisée, dans un paysage culturel liégeois qui manque de lieux d’expression, notamment dans le domaine des arts de la scène, nous sommes convaincus, la possibilité de conserver le bâtiment devrait être étudiée avant de valider sa démolition.

Les faits ont prouvé que l’inutilité présumée du bâtiment à la suite du départ du Théâtre de la place était lettre morte : sitôt abandonné, sitôt repris. Il est bien connu que les petites compagnies de théâtre cherchent désespérément et continuellement des lieux de travail, des lieux de répétition. Il en va de même pour les groupes de musiciens. Pourquoi ne pas aménager le lieu pour répondre à une pratique culturelle qui y est déjà présente, plutôt que de créer des ensembles culturels vides de programme ou de projet culturel ?

Nous nous posons en outre une série de questions, auxquelles, selon nous, le Conseil communal devrait être en mesure de répondre avant de prendre une décision irréversible dans ce dossier.

  • Combien de temps le « provisoire » va-t-il, cette fois-ci, durer ? Les seuls aménagements prévus pour l’heure, dans la foulée des démolitions, sont en effet la sécurisation (le murage) du parking, la réalisation d’une étanchéité par asphaltage de la dalle et une remise à niveau des terres jusqu’à son sommet. Aucun plan d’aménagement n’existe à notre connaissance.
  • Quelles seront les conséquences de l’imperméabilisation annoncée de toute la surface du parking (laquelle dépasse celle du bâtiment actuel) ? Flaques, boue, problèmes en sous-oeuvre et impraticabilité des lieux seront-elles évitées ?
  • Quels dispositifs seront mis en oeuvre pour empêcher cette dalle supérieure d’être utilisée comme parking sauvage ?
  • Quel usage de cet espace pourra être fait par les habitants du quartier ? Cette dalle pourra-t-elle, par exemple, voir la tenue de manifestations publiques, et dans quelles conditions ?
  • Quelle est la durée de vie estimée de cet aménagement transitoire ?
    Sera-ce l’opportunité de tester des aménagements potentiels pour la conception du futur espace public ?
  • Qu’est ce qui va être mis en place pour le développement d’un espace public de qualité ? Un concours d’architecture sur base du master plan est-il envisagé ?
  • Quel en sera le calendrier ?

En conclusion, il est difficile d’émettre un avis sérieux et crédible sans pré-étude ; c’est valable pour tout le monde, dans ce cas-ci ; tant pour ceux qui veulent démolir que pour ceux qui veulent conserver le bâtiment.

Il faut en tout cas dépasser l’idée préconçue et simplifiée selon laquelle « créer un lieu de quartier » passe par la table-rase. Peut être le bâtiment retravaillé dans ses relations au sol et « ses visages », pourrait il devenir le pôle de réflexion sur l’espace public, dont il serait le prolongement.

Il faut ajouter que l’emprise du parking, qui occupe au moins 1/3 de la surface de la place, est aussi pesante que celle du bâtiment actuel qui est hermétique sur trois de ses quatre faces. Une solution globale devrait être recherchée pour le boulevard de la constitution en même temps que la place de l’Yser, à tout le moins.

D’un point de vue méthodologique, il semble donc prématuré de prendre une décision sur le futur du bâtiment , alors qu’il y aura un projet d’aménagement de la place : pourquoi ne pas intégrer la réflexion sur l’avenir du théâtre dans ce projet et laisser se développer différents scénarios ? Et si l’on veut un projet qui a du sens sur cette place, il faut pouvoir jouer avec tous les paramètres sans les tronquer.

Aloys Beguin, architecte, enseignant à la Faculté d’architecture de l’ULg, titulaire avec Georges-Eric Lantair, de l’Atelier « Master n° 5 : XXe/reconversion », qui mène pour le moment une étude sur le thème « Et pourquoi ne pas garder le théâtre de la place ? »

Olivier de Wispelaere, ingénieur-architecte, président de l’Assemblée générale d’urbAgora, co-animateur du groupe de réflexion sur Outremeuse « Île citoyenne » (ICI)

Cette publication est éditée grâce au soutien du ministère de la culture, secteur de l'Education permanente

 

Le forum de cet article

4 messages

La présence des platanes...
posté le 29 septembre 2014 par Herman Christiane

La présence des platanes impose une transformation à minima du théâtre : laisser le resto, les loges et la petite salle car la façon dont certain arbres furent mutilé en 1970 vous oblige de laisser un bâtiment de même hauteur et même dimension pour camoufler et pour sauvegarder les racines !!!! Voir sur mon site "plantearbre" mon rapport à leurs sujet.


Vous négligez des éléments essentiels
posté le 17 décembre 2013

Vous négligez des éléments essentiels inhérents à sa conception lorsque vous listez les défauts de cette construction : la sécurité incendie et l’acoustique en premier lieu.
Il s’agissait en effet au départ d’un bâtiment clé sur porte sans sous-sol, conçu et commercialisé en France comme "déplaçable" et donc choisi essentiellement pour sa rapidité de construction dans un objectif politique des édiles de l’époque. L’architecte d’opération désigné a tout d’abord été confronté à la nécessité de redimensionner entièrement la structure métallique, les normes Afnor étant beaucoup moins exigeantes que les nôtres ; il a fallu ajouter un rideau de fer, augmenter la capacité des sanitaires et ajouter quelques locaux annexes pour répondre aux exigences des conseils artistiques. De "vrais murs" et des dalles de béton devaient ensuite remplacer les cloisonnements et bacs acier, de manière à constituer le compartimentage. Tous ces aménagements du projet ont été réalisés en s’efforçant de conserver au maximum l’apparence "mécano" du lieu, ce qui explique les multiples solutions de continuité des nœuds constructifs et les innombrables ponts acoustiques et thermiques qui en découlent. Ce qui a également posé problème dès le départ, c’est que cette volonté d’affirmer la structure en acier ne pouvait à l’époque être respectée qu’en assurant la stabilité au feu au moyen d’une peinture intumescente qui perdait progressivement ses qualités qui n’étaient garanties qu’un an ! Il aurait donc fallu en théorie procéder à un décapage et une remise en peinture environ tous les deux ans ... C’est toujours le cas !
Bien conscient qu’il n’en serait rien, le Commandant du SRI avait affirmé qu’en cas d’incendie, il interdirait à ses hommes d’entrer dans le théâtre et qu’ils protégeraient les alentours en le regardant brûler.
La construction du parking souterrain a été décidée à posteriori en raison de la nature du sous-sol constatée lors du creusement des premiers faux-puits ; il est dès lors assujetti aux descentes de charge et obstacles divers dont notamment une fosse de scène et ne constitue donc pas un modèle du genre.


Ne pourrait-on pas rénover un autre bâtiment qu’un préfabriqué trentenaire (...)
posté le 16 décembre 2013 par Samuel

Bonjour,

Je ne retombe plus sur le nom du bureau d’architectes urbanistes, mais une étude d’avant projet a bien été réalisée pour le réaménagement de la place de l’Yser. En tant qu’habitant d’Outre-meuse nous avons été conviés à plusieurs réunions de présentation au cours de l’avancement de l’étude. J’ai pu me rendre à l’une des dernières réunions lors de laquelle on nous a présenté plusieurs avant projets assez aboutis. Dans ces avant projets, le bâtiment de l’ancien théâtre de la place n’était en effet jamais conservé. Normal puisque les consignes reçues par le bureau d’urbanistes était le réaménagement de la place de l’Yser et non la restauration du théâtre.

Il faut se souvenir que l’ancien bâtiment du théâtre de la place est un bâtiment préfabriqué prévu initialement pour durer quelques années tout au plus. Je ne sais pas exactement ce qui a fait durer cette situation provisoire une trentaine d’année mais je suis plutôt content de voir les choses avancer.

J’ai eu l’occasion de participer au chantier du théâtre de l’émulation où j’ai pu y rencontrer le directeur du théâtre de la place. Il nous expliquait que le bâtiment place de l’Yser, en plus d’être vétuste et de prendre l’eau, n’était simplement plus adapté au théâtre moderne en terme d’espace en coulisse, pente des gradins, ateliers, etc. .

Je comprends tout à fait qu’on puisse être réticent à l’idée d’abattre un bâtiment en temps de crise, mais quitte a faire une rénovation, pas forcément moins chère et beaucoup plus contraignante, ne pourrait-on pas rénover un autre bâtiment qu’un préfabriqué trentenaire ?

Pour ceux qui se souviennent, (je n’étais personnellement pas né) la place de l’Yser était un parc et un lieu central de la vie sociale en Outre-Meuse. Les anciens du quartier, dont un certain Jean-Denis, peuvent encore en parler. Lors de l’implantation du théâtre de la place, la ville avait insisté sur le caractère provisoire de ce bâtiment pour le faire accepter des habitants. Le plan actuel de la ville de Liège prévoit enfin de refaire un espace ouvert de la place de l’Yser. Les avant projets tenaient compte de la crise et ne faisait pas table rase du bâtiment en prévoyant de récupérer la dalle et le parking souterrain. La mobilité dans le quartier avait me semble-t-il été réfléchie en proposant notamment de faire un piétonnier du Boulevard de l’Est avec accès pour les bus (et tram ?). Je ne comprends pas bien cette levée du bouclier par rapport à la destruction du bâtiment. Le vrai combat ne serait-il pas la place de la voiture et des transports en commun sur la nouvelle place, repenser la mobilité en outre-meuse et concevoir une place multi-usage et agréable plutôt que de vouloir conserver l’ancien théâtre ?


Réfléchir avant de démolir
posté le 16 décembre 2013 par Gilbert Letawe (Membre de la Compagnie Théâtrale du Grangousier)

Entièrement d’accord avec l’article ! Des structures existent dans le théâtre tant professionnel qu’amateur qui ne trouvent pas de lieu pour simplement entreposer leur matériel, répéter, jouer dans de bonnes conditions. La Ville de Liège n’est pas un modèle du genre quand il s’agit de subsidier le théâtre amateur... Le Théâtre de Liège a coûté cher, très cher et continuera de coûter cher...et le prix des places n’ira qu’en s’accroissant. Les représentations de Théâtre à La Place sont gratuites et il y a des manifestations culturelles tous les jours ! Il y a de la place pour tout le monde à Liège...Les représentations à Tilleur sous le chapiteau d’Arsenic2 ont fait salle comble tous les jours et ce pendant 33 représentations...Pas de public à Liège pour le théâtre ? La musique ?

Si on veut faire de Liège une place forte de la culture, il serait temps de réfléchir avant de démolir.

Bises à tous


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