Les grands espaces verts qui descendent de Beyne-Heusay vers Chênée, tout autour du vallon du Ry-Poney, sont méconnus de beaucoup d’habitants de l’agglomération. Ils constituent pourtant un espace paysager exceptionnel de plusieurs centaines d’hectares, largement préservé, et remarquablement situé.
Une partie de ces terrains, actuellement dévolus à l’agriculture, se trouvent cependant en zone bâtissable. Un promoteur immobilier souhaite aujourd’hui construire 500 logements sur une zone de 35 hectares située au cœur de cet espace. Et ce pourrait n’être que la première phase d’un plan beaucoup plus vaste.
Même si ce projet immobilier est présenté comme un « éco-quartier », il s’agit d’un projet monofonctionnel (uniquement du logement), qui n’intègre pas les équipements nécessaires à ses habitants, très peu accessible depuis les infrastructures de transport en commun existantes, et dont la mobilité est toute entière tournée vers la voiture individuelle. De quoi renforcer un peu plus encore l’engorgement de Chênée et des vallées.
Du logement ? Oui, mais pas comme ça !
La Ville de Liège a pourtant besoin de logement, pour accueillir dans de bonnes conditions les dizaines de milliers de nouveaux habitants dont l’arrivée est prévue dans les 20 ou 30 années à venir.
Nous pensons cependant qu’une autre stratégie est possible, qui permettrait d’organiser le territoire d’une façon plus cohérente, en localisant les nouveaux logements dont on a besoin à proximité des transports en commun, des commerces et des écoles. Et justement, le site « Cuivre & zinc » situé entre la place du Gravier et la gare, au cœur de Chênée, pourrait être l’un des sites où centraliser ces logements dont on a besoin, mais également d’autres fonctions.
Cette stratégie serait bénéfique au dynamisme du quartier, de ses commerces, de ses espaces publics. Elle permettrait de faire de la gare de Chênée un vrai pôle multimodal, entre le train, le bus, des parkings-relais et, demain, le tram. Cette stratégie, elle est aussi compatible avec la préservation du magnifique site du Ry-Poney. Mieux : ce parc métropolitain — en créant un immense poumon vert — contribuera à rendre la vie plus agréable dans tous les quartiers situés aux alentours et bien au-delà.
L’objet du scénario que nous proposons ici est d’ouvrir le débat, de montrer que d’autres possibilités existent que celle qui est aujourd’hui proposée.
Caroline Minon et François Schreuer
UN PARC, TROIS FONCTIONS
Une fonction de loisir
Itinéraires de promenade pour les marcheurs, les cyclistes et les chevaux, espaces dédiés aux barbecue ou simplement à la détente, quelques terrains de sport, peut-être une piscine en plein air,... le parc serait un endroit ouvert à toutes et tous.
Une fonction de maraîchage et de viticulture
Nous proposons de consacrer une partie du parc à l’implantation d’une série de petites exploitations maraichères, pratiquant une agriculture respectueuse de l’environnement et intensives en main d’œuvre. La viticulture aurait sans doute aussi sa place ; elle contribuerait notamment à limiter l’écoulement des eaux de pluie vers la vallée.
Une fonction de préservation de la biodiversité
Le parc se conçoit enfin comme un réservoir de biodiversité. Les espaces naturels existant (bois, zones humides, pâtures) devraient être protégés, agrandis et diversifiés. Une réserve naturelle pourrait être créée sur les espaces les plus intéressants, en fonction d’une évaluation détaillée à réaliser.
LA RÉHABILITATION DU SITE « CUIVRE ET ZINC »
L’ancien site industriel Cuivre et Zinc, d’une surface d’environ 7 hectares, fait aujourd’hui l’objet d’un assainissement de ses sols par la SPAQuE.
Avant d’urbaniser des terrains vierges, il devrait être prioritaire d’utiliser les friches existantes, a fortiori lorsqu’elles sont aussi bien situées. Nous pensons que le site « Cuivre et Zinc » pourrait accueillir plusieurs centaines de logements, un pôle de transport multimodal (grâce à la présence de la gare de Chênée), une école et une crèche mais également une grande place publique avec du commerce, un parc artisanal le long du chemin de fer. Il s’organiserait autour d’une percée paysagère reliant la gare et la place du Gravier.
ET LA MOBILITÉ À CHÊNÉE ?
Localisée au carrefour de plusieurs voies de communication importantes, Chênée subit un trafic de transit considérable, qui englue la vallée plusieurs heures par jour. La poursuite d’une urbanisation incontrôlée risque de rendre cette situation encore plus difficile. Nous proposons une approche en trois axes.
Réorganiser les transports publics autour de la gare
Le train permet de rejoindre le centre-ville en quelques minutes à peine. Pourtant la gare, isolée et extrêmement peu accueillante, reste sous-utilisée voire ignorée. Le scénario que nous proposons ici la remet au centre du jeu. En en faisant le centre d’un nouveau quartier à construire sur le site « Cuivre et zinc », et en organisant autour d’elle un pôle d’échange entre différents modes de transport (gare des bus, parking-relais, dépose-minute, etc).
À moyen terme, la « Transurbaine », seconde ligne de tram de l’agglomération, pourrait trouver son terminus à la gare de Chênée et offrir une excellente desserte de transport public à tout le quartier.
Développer le réseau cyclopédestre
La présence de deux « Ravel » (Ourthe et ligne 38) est un atout considérable pour Chênée. Ces itinéraires évitent cependant le centre de Chênée et ne sont pas reliés entre eux. Nous proposons donc...
- De créer une jonction entre les deux Ravel existant, à travers le centre du quartier, en passant devant les écoles. Pour ce faire une passerelle cyclo-pédestre pourrait être construite sur l’Ourthe, un peu en aval du confluent.
- D’intégrer le projet de « Ravel Vesdre » dans un schéma d’ensemble. Et éventuellement de le poursuivre jusqu’à Grivegnée-Bas.
Dévier le trafic de transit hors du centre de Chênée
Enfin, nous sommes convaincus que la rue de la Station — de même que le site du confluent de la Vesdre et de l’Ourthe — doivent être libérés du trafic de transit qui y est massivement présent, pour devenir un espace public de qualité, orienté vers l’HoReCa et des fonctions de loisir. Pour ce faire, nous proposons la création d’un itinéraire de contournement (via la rive gauche de l’Ourthe, en lien avec la sortie d’autoroute « 18 arcades ») et le remplacement de l’actuel Pont de Chênée par un autre, plus discret, et pied de l’ancien Hôtel de Ville, qui serait réservé aux bus, aux vélos et aux piétons.